22.01.22 13:17

SCHWARZER ENGEL - "Sieben"

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Il n’y a que peu de temps que j’ai perdu tout espoir de retrouver un jour le son primal de la Neue Deutsche Härte (celles et ceux ayant lu ma chronique sur le dernier Schattenmann savent que ça date plus ou moins de ce moment-là). En poussant la critique à son paroxysme, on se demanderait presque si le genre à un jour tenu sur ses deux jambes, tant on a l’impression que seuls les débuts de carrière d’Oomph ! et Rammstein portent l’estampe de ce « tanzmetall » aussi expérimental que froid, aussi lié à ses racines industrielles qu’harnaché à de gros instruments qui tabassent, ce côté martial renforçant l’aspect biomécanique lugubre de la musique. Même les deux gros noms ont mal supporté le passage à l’an 2000, et il en va de même pour les groupes qui les ont suivis.

Pourquoi diable persister dans cette voie qui de toute évidence ne me plaît pas ? Difficile à dire… Dans l’espoir de retrouver au moins un fragment de ce terreau sous-exploité sans doute. L’envie d’y retrouver un simple style indus aux textes germaniques, d’y retrouver du metal qui fait mumuse sur des synthés et autres outils informatiques pour donner l’illusion de sons produits par on ne sait quelle machinerie lourde. D’y retrouver un metal qui donne envie de tortiller du cul en cosplay de Matrix. Pour qu’au final… Le résultat ne comporte, au mieux, que l’influence noire des textes les plus glauques que le genre a pu offrir. Bien souvent, on se retrouve surtout avec du larmoyant en allemand. Et malheureusement, vous l’aurez compris, Schwarzer Engel en fait totalement partie.

J’ai eu l’occasion de chroniquer « Kreuziget Mich » (« Crucifiez-moi ») il y a un peu plus d’un an de cela. Un simple EP, doté d’un remix du single et de deux autres titres, dont un orchestral. J’en avais été assez peu impressionné, avec un aspect industriel trop peu mis en avant, et les deux titres accompagnant la chanson phare relevant de l’anecdotique. Je suis assez surpris de revoir l’EP (débarrassé toutefois du remix) en tête de gondole de « Sieben », même si ce dernier était en fait censé sortir fin 2020 (d’où le choix curieux de sortir un premier jet à l’époque et la suite en 2022).  Plus exactement, il est étonnant de le revoir en l’état, sans modifications majeures et dans l’ordre ! Mais cet EP était aussi annonciateur des défauts à venir. Mes méconnaissances sur la discographie plus large du groupe appauvrissent mon opinion, mais le manque de folie sur la partie électronique me dérange fortement. Cela manque de peps, d’inventivité. À la place, on se tape beaucoup de morceaux plutôt émotionnels, lents et que l’on imagine poétiques. Sans juger de la qualité des textes (mon allemand étant ce qu’il est), je jugerai plutôt de la relative redondance dans les « atmosphères » proposées. Avoir des instants plus relaxés, plus sensibles n’est pas un mal en soi. On a parfois même des albums entiers dédiés à l’intimité d’un auteur, à une approche plus minimaliste ou tout du moins plus calme. Ici néanmoins, on ne peut s’empêcher d’avoir un peu l’impression de tourner en rond et dans le « romantisme noir » pourtant promis. Nul doute qu’une bonne compréhension du texte devrait rattraper les quelques lacunes instrumentales. Parce qu’en l’état, la ritournelle entêtante de « Vollmond » est un peu faible pour sauver le tout.

Reste alors les quelques titres usant d’un peu plus d’électronique donc. Ce qui fait paradoxalement de « Kreuziget Mich » l’un des meilleurs de la galette. Copie conforme de son pendant 2020, il ne rivalise pas avec les classiques mais s’en sort pas trop mal. « Ewig Leben » fait cracher les guitares, et ça fait DU BIEN ! Son côté indus reste faiblard mais il est moins timide. Mais paradoxalement, mon morceau préféré, c’est celui de la fin (proprement nommé « Endzeit »). Il donne tout ! Il est plus musclé, plus efficace (il a même des « HEY ! » digne d’un hymne de stade !) et avec un petit côté épique en plus qui le rend… franchement sympathique. Sans renoncer à l’émotionnel teinté de poésie noire, semblants si cher au style de l’Ange Noir, gagner un ou deux titres de plus de cette trempe aurait fait plaisir. Ne serait-ce qu’en guise de pause jouissive, de titre plus dansant.

Alors voilà, j’ai pu mentionner à plusieurs reprises mon profond respect pour les artistes réalisant tout en solo. Dave Jason n’échappe pas à cette règle et je salue son audace. Mais il n’est pas un cas isolé, pas même dans le monde de l’indus ou du gothique (loin de là, ça semble presque être une norme, en attestent Assemblage 23, Hante ou Author & The Punisher). Une telle répétitivité et un tel manque d’audace est donc difficilement justifiable. Les membres de Rammstein parlaient d’eux comme d’une « thérapie » ou d’une « démocratie » pour expliquer la force de leur barque, au line-up inchangé depuis presque trente ans. Implicitement, ils évoquaient aussi l’apport créatif que peuvent avoir six têtes plutôt qu’une. Peut-être Schwarzer Engel serait plus incisif et mémorable dans la tête de plusieurs artistes. Mais dans celle de Dave Jason… On s’y ennuie fortement. L’album est-il interchangeable dans la discographie de SE ? Je ne saurai vous le dire. Il l’est en tout cas dans la grande masse d’artistes évoluant dans le genre depuis une bonne quinzaine d’années.

Informations supplémentaires

  • Points: 3/5
  • Genre: Gothic Metal / NDH
  • Pays: Allemagne
  • Maison de disque: Massacre Records
  • Date de sortie: 07.01.22
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Ale

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