04.09.21 11:26

GOST - "Rites Of Love And Reverence"

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À peu près deux ans après Valediction (chroniqué par votre serviteur, dieu que le temps passe vite !), l’âme tourmentée derrière le projet GosT nous revient avec un album à l’atmosphère aussi lugubre que l’album précédent était sensuel. Ce dernier à la pochette plutôt intrigante, inquiétante et esthétique à la fois, et aux titres aux relents gothiques et torturés, toujours avec un soupçon de romantisme. C’est que James Lollar, maître-architecte du projet, lorgne du côté de Priest, VR Sex ou Mr.Kitty plutôt que chez les Perturbator ou Carpenter Brut, figures de référence de la synth et d’autant plus par chez nous (rappelons, s’il le fallait encore, qu’ils sont franco-français !). Cette comparaison s’inscrit autant dans les thématiques que les sonorités, bien que leurs univers se frôlent sans jamais réellement fusionner. Et ce n’est pas plus mal.

Car même si GosT trouve sans doute moins les faveurs des metalleux (Perturbator et Carpenter Brut étant désormais habitués des festoches) ou des geeks (leur musique était présente dans les deux Hotline Miami), il touche un public peut-être plus vaste, plus ouvert aussi. Outre nos deux lascars, il a aussi tourné avec 3TEETH et, plus surprenant, Mayhem ou Power Trip. La synthwave a rapidement su s’extirper et s’éclater en dizaines de fragments parfois très différents. Si l’on avait tendance à regrouper tous les noms cités sous le terme générique de « darksynth », c’est sans doute lié à la fois à leurs sonorités généralement plus lugubres, brutales, rapides et écrasantes ainsi qu’à leurs paroles (quand il y en a) tantôt déprimées et vidées de passion, tantôt cryptiques, futuristes et langoureuses. Rien que ce terme pourrait être divisé en deux clans : d’un côté la darksynth puissante, effrénée, dansante et psychédélique et de l’autre celle plus poétique, plus balafrée, plus froide. Ironiquement, cette deuxième catégorie porte mieux les relents de gothique, surtout de « wave », suffixe présent dans le genre plus global de la « synthwave ». Si le premier genre s’acoquine parfaitement au genre cyberpunk, aux néons des dystopies Blade Runner-iennes , aux froides machines et aux night clubs douteux… Le second évolue davantage dans l’horreur, le fantastique, la nuit noire dérangée par la brume et la pluie verglacée. Les deux sont indubitablement liés et se serrent parfois la main, il est difficile de renier que tout le monde n’aimera pas ces deux écoles de la même manière.

Mais revenons-en à GosT, s’inscrivant donc plutôt dans ce deuxième carcan et prouvant une fois encore que les one-man-bands sont des cas passionnants à étudier, car toujours un peu plus intimes et forcément très personnels. On appréciera par exemple « Bound By The Horror » qui, au-delà de l’évidence-même de son nom, propose un revers horrifique dans sa deuxième moitié, rappelant un peu « Carbon Cult » de Deadlife (qui pour le coup semble tout droit sortir d’un slasher !). Le titre de GosT demeure plus brut, plus éraillé et chaotique mais il illustre à merveille ce que j’entends par « darksynth aux relents d’épouvante ». Il est suivi par “The Fear” (difficile de croire que ce n’est pas fait exprès !), et ce dernier est plus classique. Presque trop en vérité, surtout après dix ans de synthwave par des artistes nombreux et parfois très éphémères. C’est dansant et les paroles sont envoûtantes, mais le tout manque d’éclat. « A Fleeting Whisper » vient redresser la barre en alternant entre passages lourds et pesants et moments d’accélérations intenses. Quelques mois à peine après le déjà mythique « Excess » de Perturbator, gageons que de beaux pogos auront lieu sur ce titre ! « We Are The Crypt » quant à lui lorgne davantage du côté de « SKULjammer » de Mega Drive, gros inclassable mélangeant les deux écoles susmentionnées pour mieux les dynamiter de l’intérieur. On retiendra des titres diablement efficaces, entraînants à souhait tout en conservant cette couche d’onirisme vampirique.

Sans sonder tout l’album, soulignons encore « Blessed Be » et son intro à l’orgue mutant en musique d’autoroute nocturne. « November Is Death » est mystique et planant. « Embrace The Blade » rajoute une gratte bien râpeuse à un ensemble presque magique. « Coven » avance encore d’un cran dans la puissance, avec un titre lorgnant cette fois plus franchement dans le Perturbator-like en termes de sonorités, et toujours dans une ambiance « cold wave » avec les paroles. Un hybride fonctionnant à merveille, et sans doute un autre titre qui gagnera à être expérimenté en live. Enfin, « Burning Thyme » vient faire retomber la pression, tout en minimalisme avec juste la voix de James pour nous porter les premiers deux-tiers du morceau, suivi d’un beat à nouveau fort classique pour de la synth, mais qui ne fonctionne pas trop mal pour clore l’album. On aurait tout de même aimé quelque chose d’un peu plus risqué et audacieux pour finir ce chapitre voulu plus sombre et dramatique. On saluera néanmoins la forte tendance à l’excentricité du gaillard. Versatile et changeant, GosT propose une palette étonnante qui varie même au sein d’un album.  En bref, ROLAR est un nouvel opus garnissant à merveille la discographie déjà fort fournie de notre sombre poète. Moins punchy et endiablé que le précédent, il le compense par une teinte plus macabre et cauchemardesque. Assurément, la pandémie (entre autres), a dû travailler l’esprit de James Lollar, faisant naître de nouvelles idées sombres. Heureux qu’il continue son bout de chemin, on le sera d’autant plus s’il suit la précédente tendance de sortir deux albums coup-sur-coup (Behemoth et Non Paradisi, puis Possessor et Valediction sont sortis à un an d’intervalle). Fans de macabre, vous voilà servis !

Informations supplémentaires

  • Points: 4/5
  • Genre: Darksynth
  • Pays: USA
  • Maison de disque: Century media records
  • Date de sortie: 13.08.21
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Ale